Évidemment ces trop nombreux scandales mettent en relief la question d’un clergé romain obligatoirement célibataire. Y a-t-il ou non un lien de cause à effet, entre le fait que ces hommes voulant servir l’Église dans la prêtrise soient obligé de choisir un état de vie célibataire et le fait que plusieurs d’entres-eux développent cette déviance sexuelle ? Il est préférable de laisser les psychologues répondre directement à cette question. Cependant la sagesse chrétienne nous apprend certaines choses de très grande importance, et il faut entendre ici « sagesse chrétienne » n’étant point réduit au catholicisme romain. Avant le malheureux schisme ayant séparé les chrétiens d’Orient (les Églises orthodoxes) par rapport aux catholiques du patriarcat de Rome en 1054, cette discipline obligatoire d’un clergé célibataire n’était point en vigueur malgré certaines tentatives contraires.
Les théologiens catholiques auront beau évoquer les plus grandes vertus des appels évangéliques à la sainteté, là où ils se trompent c’est en faisant une adéquation néfaste entre sainteté de vie et vie sexuelle inhibée. Tout cela dans le but de préserver à tout prix le sacro saint célibat du clergé catholique romain. C’est à partir du premier concile du Latran en 1139 que cette règle devient obligatoire dans le catholicisme.
Il faut savoir pour le commun des mortels que le célibat obligatoire du clergé dans l’Église catholique romaine ne provient d’aucun commandement évangélique; il ne provient d’aucune prescription du collège des Apôtres du Christ ayant fondé les diverses Églises d’Asie mineure jusqu’au cœur de l’Empire romain, au contraire, même l’Apôtre Paul va émettre une prescription très stricte en cette matière : « "Elle est sûre cette parole; celui qui aspire à la charge d'épiscope* désire une noble fonction. Aussi faut-il que l'épiscope soit irréprochable, mari d'une seule femme, qu'il soit sobre, pondéré, courtois, hospitalier, apte à l'enseignement, ni buveur ni batailleur, mais bienveillant, ennemi des chicanes, détaché de l'argent, sachant bien gouverner sa propre maison et tenir ses enfants dans la soumission d'une manière parfaitement digne. Car celui qui ne sait pas gouverner sa propre maison, comment pourrait-il prendre soin de l'Eglise de Dieu ? Que ce ne soit pas un converti de fraîche date, de peur que, l'orgueil lui tournant la tête, il ne vienne à encourir la même condamnation que le diable. Il faut en outre que ceux du dehors rendent de lui un bon témoignage, de peur qu'il ne tombe dans l'opprobre et les filets du diable. » (1Timothée 3,1-7); cette obligation d’un clergé obligatoirement célibataire n’est aucunement prescrit non plus par les Pères de l’Église et les Sept Conciles œcuméniques. En d’autres termes la Tradition Apostolique de l’Église indivise n’a jamais commandé une telle chose.
Une première tentative d’imposer au clergé un célibat obligatoire échoua au premier Concile de Nicée en 325. L’auteur Socrate (pas le philosophe) rapporte en effet dans son Histoire ecclésiastique au Livre 1, c. 11: « Mais le confesseur Paphnuce, évêque dans la haute Thébaïde, l'un des plus illustres et des plus saints d'entre les prélats, et qui avait toujours vécu dans la continence, se leva au milieu de l'assemblée et dit à haute voix qu'il ne fallait point imposer un joug si pesant aux ministres sacrés ; que le lit nuptial est honorable et le mariage sans tache ; que cet excès de rigueur nuirait plutôt à l'Église ; que tous ne pouvaient porter une continence si parfaite, et que la chasteté conjugale en serait peut-être moins bien gardée : qu'il suffisait que celui qui était une fois ordonné clerc n'eût plus la liberté de se marier, suivant l'ancienne tradition de l'Église ». Les sordides histoires révélées aujourd’hui à la face du monde entier montrent hors de tout doute que les sages paroles de cet évêque furent sans doute d’inspiration divine.
La plus grande erreur du catholicisme romain en cette matière est d’avoir fait une symbiose entre la vie monastique et la vie dans le monde d’un clerc. Il y a pourtant un abysse les séparant comme le démontre l’évêque Paphnuce de Thébaïde ! La vie monastique offre des conditions favorisant une vie saine au plan de l’équilibre psychique pour les individus qui la choisissent. Le prêtre inséré en paroisse lui, a des conditions de vie radicalement différentes par rapport à celles en monastère. Il vit au cœur même de la cité, mêlé aux gens, subissant des influences mondaines de tous acabits, bref : rien ne visant à protéger sa promesse de célibat, car contrairement aux religieux, le prêtre catholique ne prononce pas de vœu de chasteté.
L’Église orthodoxe dans sa sagesse, n’ayant jamais imposé quelque règle disciplinaire à l’égard de ces futurs prêtres en termes de vie de célibat, a compris que si l’un de ses candidats à la vie presbytérale voulait choisir le célibat dans sa vie de prêtre, il devait le vivre à l’intérieur d’un monastère, et c’est la coutume la plus répandue dans la grande majorité des Églises orthodoxes dans le monde. Un homme marié voulant servir l’Église orthodoxe comme prêtre recevra l’ordination (s’il est jugé apte à occuper de telles fonctions) sans discrimination par rapport à ses frères ayant choisit le célibat et sera appelé à servir à l’intérieur des paroisses. On le voit donc, dans le principe l’Église orthodoxe est ainsi demeurée fidèle aux origines de la Tradition Apostolique, aux Sept Conciles œcuméniques et à la Patristique.
Avant d’entreprendre la rédaction de cet article pour mon blogue aujourd’hui, j’ai eu l’idée d’entreprendre des recherches sur Google à l’aide de mots clés pour trouver si des articles de presse mettaient en avant scène des histoires de pédophilie impliquant des membres du clergé orthodoxe : faites l’exercice par vous-même et vous ne trouverez rien de crédible ou de fondé. Je n’affirme pas que cela n’existe pas chez les orthodoxes, mais je suis d’avis qu’un clergé dont les membres ont choisi leur état de vie au lieu de se le faire imposer favorise nettement l’équilibre psychologique tout en diminuant les risques de scandales.
En fait peut-être est-ce là un début de prise de conscience nécessaire dans l’état actuel des choses dans le catholicisme romain, car il m’apparaît très clairement aujourd’hui que la crédibilité de cette institution est à jamais entachée par ces histoires sordides et la seule voie pouvant apparaître comme étant salutaire en ce moment pour rétablir un temps soit peu de crédibilité de l’institution tout comme celui du message évangélique est une mise à l’écart définitive d’une discipline causant plus de tort que de bien, et le tort causé par cette discipline va bien au-delà d’une question de crédibilité, il s’agit de la vie de jeunes enfants qu’on détruit par d’ignobles actes méritant un procès en cour criminel.
Région de Soulanges au Québec.
Dimanche le 28 mars 2010, 00h10.
N.B. : L’auteur professe la foi de l’Église orthodoxe depuis Pâques 2000, après avoir été membre de l’Église catholique romaine dont il fut séminariste entre les années 1993 à 1997.
* Épiscope : dans l’Église primitive on nommait des responsables à la tête des communautés naissantes. On les appelait tantôt presbytre (qui vient du grec presbuteros = ancien), tantôt épiscope (du grec épis-kopos = surveillant ou gardien).
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