Lorsque nous nous arrêtons pour y
réfléchir, c'est une évidence que rien n'est plus subjectif à chaque individu
que la question de chacun des goûts.
Si nos besoins primaires de se nourrir,
dormir, se vêtir, se couvrir, se reproduire et pourvoir à tous ces besoins
relèvent de la nature de l'être humain, chacun de nos besoins primaires ne
répondent-ils non seulement à des besoins vitaux, mais sont également
conditionnés par la culture ambiante.
Il y a cependant un lieu où nous
répondons à des goûts culturels qui n'ont aucun lien en rapport à un besoin
vital, c'est celui d'entendre de la musique. La privation de musique ne peut
pas causer la mort, alors que la privation d'un besoin primaire ou de son abus
peuvent mener au décès.
À quoi je veux en venir en
rapprochant musique et nourriture? La musique présente dans les restaurants,
les épiceries, entre autres choses, et même en d'autres espaces publics. Que de
fois que je me rends en un espace public et que je ne cherche qu'à fuir
l'endroit parce qu'on vient me casser les oreilles avec un type de musique que
je n'aime pas! Cherche-t-on à favoriser le commerce ou le contraire? Si le
commerce en est le but, alors revoyez vos façons de faire en matière de sons et
de bruits ambiants.
Pourquoi nous rendons-nous au
restaurant? Les raisons sont certainement variées. Mais essentiellement pour se
nourrir et vivre une expérience gustative, à la base certes, mais y vivre une
expérience éminemment sensorielle par-dessus tout, peu importe le choix de type
de restaurant que je vais faire. Tous les sens sont sollicités lorsque je vais
au restaurant : vue, odorat, tactile, gouter et ouïe.
Si je prends la décision de me
rendre dans une chaîne de restaurant rapide, je fais le choix de manger
rapidement sans vraiment trop me préoccuper du raffinement alimentaire. Et
avouons-nous-le franchement : les autres sens ne sont pas très gâtés dans ce
type de restaurant. L'élément que je trouve préoccupant, est le choix et la
force de la musique qu'on nous impose en ces lieux. Souvent, c'est de la
musique pop et/ou rock assez forte. Cherchons-nous à plaire à la clientèle ou
répondons-nous uniquement aux goûts musicaux des proprios? Combien de fois
ai-je voulu me rendre dans un restaurant de ce type pour y prendre mon petit
déjeuner le matin, et qu'une fois entré à l'intérieur j'ai rebroussé chemin
parce que je me suis fait casser les oreilles par de la grosse guitare
électrique le matin à 5h30? Non mais franchement!
Par contre si mon choix se porte
vers un restaurant reconnu pour la finesse de ses plats, alors c'est une autre
histoire.
Par exemple, si, un soir j'ai
envie de me rendre dans un restaurant de fine cuisine chinoise avec ma famille,
non seulement vais-je vivre l'expérience de goûter à l'Asie, mais également mes
autres sens seront généralement sollicités par l'expérience de l'Asie : au plan
visuel (le décor et le style vestimentaire des gens qui font le service), au
plan de l'odorat (odeurs de la cuisine), au plan tactile avec l'utilisation de
baguettes chinoises pour porter la nourriture à ma bouche, par exemple. Mais
trop souvent, je suis témoin d'une incohérence parfaite dans l'harmonie de mon
expérience sensorielle : mes oreilles sont exposées à de la musique pop ou
rock, et très souvent à un volume où je dois élever la voix pour me faire
comprendre des gens avec qui je tente de faire la conversation. Pensons-y : on
veut me faire vivre une expérience sensorielle chinoise, japonaise,
thaïlandaise ou vietnamienne avec tous mes sens, sauf mes oreilles : pourquoi
autant d'incohérence? Je veux vivre une expérience asiatique dans un restaurant
de fine cuisine asiatique sur tous mes sens : mettez de la musique
traditionnelle d'Asie pour l'amour du ciel! Et de grâce, à un volume où elle
fait partie du décor et non pas s'imposer par-dessus tout.
Ce que je viens d'illustrer pour
l'expérience asiatique en restauration est d'autant plus vrai pour l'expérience
italienne, grecque, québécoise, etc. À combien de reprises m'est-il arrivé de
me rendre dans une cabane à sucre au printemps, où l'on veut me faire vivre une
expérience d'une certaine époque du Québec sur tous mes sens sauf qu'on nous
remplit les oreilles avec du rock à tue-tête. Mais qu'est-ce donc que ça?
Mettez-nous de la musique traditionnelle du Québec que diable! On a plein de
groupes de musique dite « trad » et il y a une recrudescence pour ce type de
musique chez les jeunes et je suis là pour ça : pour vivre l'expérience de la
tradition québécoise!
En d'autres termes, mesdames et
messieurs les tenanciers de restaurant, faites donc preuve de cohérence et
soyez harmonieux en regard de l'expérience sensorielle que le client vient
vivre dans votre établissement. Vous lui offrez un décor, des couleurs, des
odeurs et des goûts d'un type de cuisine? Alors, offrez-lui de la musique qui
s'y marie dans une ambiance feutrée pour que l'on puisse se parler!
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